Paysages Augmentés
Bas Smets, commissaire de la biennale d’Agora 2017, architecte paysagiste, présente l’exposition « Paysages augmentés », à travers 10 films et 10 villes, avec les artistes vidéastes Bêka&Lemoine et Christian Barani.
« Depuis que les villes se transforment en métropoles, l’urbanisation est devenue planétaire. Le paysage ne se trouve plus en dehors de cette urbanisation, mais devient un élément essentiel du projet métropolitain. A l’heure où la population mondiale dépasse les 7,5 milliards, dont la moitié habite dans des métropoles, et où la perte des habitats naturels devient irréversible sans encore pouvoir estimer les impacts des changements climatiques, l’ambition du projet de paysage est à redéfinir.
L’exposition ‘Paysages Augmentés » explore la notion du projet de paysage à travers une double approche. Avec les réalisateurs Ila Beka et Louise Lemoine, nous présentons cinq portraits de paysages urbains, révélant l’influence de la géographie et du climat sur les pratiques et les comportements des habitants de la métropole : l’apprivoisement du gel et de la glace lors de la métamorphose hivernale de Saint-Pétersbourg, l’inventivité des économies informelles suite aux pluies tropicales de Bogota, les activités contrastées de la ville de Naples, entre torpeur et chaos au pied du volcan, l’intensité du travail et des petits métiers dans la jungle urbaine de Seoul, mais aussi les mesures de protection contre le soleil et la chaleur dans la médina de Rabat. Les cinq films illustrent en quoi la géographie et le climat influencent le rapport qu’a l’homme urbain à son paysage métropolitain.
Avec le réalisateur Christian Barani, nous avons exploré des projets de paysage dans cinq métropoles contemporaines. Ils répondent notamment à la nécessité de contenir les montagnes friables à Hong Kong, l’ambition de transformer l’île de Singapour en jardin, la résistance du réseau de lacs et de rochers face au développement d’Hyderabad, l’opportunité de donner de l’amplitude à la nature à Bordeaux et à l’idée de projet de paysage comme nouvelle image pour Bruxelles. Ces films montrent la capacité de l’Homme à transformer son territoire à partir d’une projection précise du paysage. Les cinq derniers films sont accompagnés d’une recherche cartographique. Les éléments qui constituent le meilleur paysage, caché dans la réalité, sont coupés du territoire. Souvent liés à l’hydrographie et à la topographie, ces éléments permettent de dessiner des figures paysagères qui révèlent la « résilience » du territoire, et donc sa spécificité. Hiérarchisées par une gradation blanche, ces cartes sont le point de départ idéal pour imaginer des paysages augmentés, par l’accumulation de plusieurs fonctions et services.
Les dix films sont diffusés sur un double dispositif pentagonal permettant aux visiteurs d’être immergés dans les paysages. Les cinq films de portraits des paysages urbains sont présentés simultanément sur cinq écrans, illustrant la richesse et la variété des situations rencontrées et chacun des cinq films sur les recherches du projet de paysage, est déployé sur cinq écrans.
Le dispositif n’offre pas de point de vue privilégié, ni ne permet de tout voir. Les paysages que verront les visiteurs seront conditionnés par leurs mouvements dans l’espace.
Cette double approche, entre pratique et projet, est mise en perspective par trois visions particulières sur le paysage, sous la forme d’un tableau, d’un laboratoire et d’un objet de pouvoir.
Un tableau original du 16ème siècle de Joachim Patinir, considéré comme l’un des inventeurs du paysage européen, nous présente un paysage imaginaire, organisé suivant les règles de la perspective. Biosphère II est un laboratoire en Arizona, hermétiquement fermé autour d’une reproduction des écosystèmes de la planète. Un documentaire réalisé avec Wannes Peremans raconte l’histoire de ce paysage artificiel surveillé. Le Boli, un objet de pouvoir africain, contient en lui tous les éléments de l’univers à travers un paysage intériorisé. Présenté comme un triptyque, le Patinir, Biosphère II et le Boli esquissent les contours de la projection du paysage comme sujet imaginé, reconstruit et symbolique.
L’exposition révèle les influences mutuelles de l’homme et du paysage. Elle invite à imaginer l’avenir du paysage et affirme l’ambition de son projet. »
Bas Smets
Exposition au Hangar 14 du 20 au 24 septembre 2017.
Du mercredi au dimanche de 10h à 20h.
Accès libre et gratuit.